Alors que les lampions de la 33e Coupe d’Afrique des Nations s’éteindront dans quelques jours, sans doute avec le même panache qui les avait embrasés, on peut déjà épiloguer sur les traces que cet évènement laissera dans notre patrimoine historique et notre vécu. L’exercice des bilans n’est pas vraiment le genre de la maison, mais comment passer sous silence la déflagrante liesse irriguant chaque artère spatiale et émotionnelle du pays, pour y semer la graine d’une fierté amplifiée qui ouvre désormais la porte à bien des possibles. Car oui, le temps d’une CAN, les kmers ont frémi d’orgueil et de fierté.
De la beauté des stades aux villes plus coquettes que jamais, de la vie qui ne dort jamais dans les fanzones officielles et dans les plus informelles, de cette cérémonie d’ouverture qui nous aura mis les étoiles plein les yeux aux frissons de terrain provoqués par la bande à Vincent Aboubakar, ces jours de magie et de féerie ont momentanément gommé la fameuse sinistrose de janvier, mis une sourdine sur les différends politiques d’habitude si passionnés, et même recouvert à coups de vuvuzelas les brouhahas des comptenteurs locaux qui ne misaient pas une pièce sur la réussite de l’organisation.
Cette fièvre fut si contagieuse que son centre de gravité établi dans les cinq villes hôtes Yaoundé, Douala, Limbe, Garoua et Bafoussam, a rapidement irradié toutes les artères et communes du triangle national. De Mayo Darlé à Esse, de Bagangté à Kribi, de Mfou à Pitoa, la multiplication des fanzones pour permettre de supporter et célébrer dans la communion a réussi à gommer différences et différends pour laisser battre le coeur de la nation, le coeur Lion.
Alors forcément, au lendemain de la grande fête du football africain, certains pourront avoir comme une impression de gueule de bois. Les retours aux quotidiens ordinaires après les parenthèses enchantées ont souvent cet effet grisé. Les débats domestiques plus houleux reviendront aux devants de la scène, les tribunaux populaires réclameront des têtes pour tout ce qu’ils jugeront pas assez bien fait, les traditionnels métro-boulot-dodo et leur convoi de stress de jours de nervosité se réinstalleront tandis que les plus positifs commenceront à scru-ter les calendriers pour lancer le décompte avant le prochain grand évènement festif. Heureux hasard du calendrier, entre la fête de la jeunesse, celle des amoureux et un peu plus loin la journée internationale de la femme le souflet entrain festif ne devrait pas trop vite retomber.
En ce qui nous concerne, nous avons la faiblesse de penser que dans cette CAN 2021 en 2022, le Cameroun a tout gagné. Ces stades parmi les plus beaux du continent désormais, les infrastructures urbaines qui ont tant embelli nos villes, des hôtels qui auront enfin mérité leurs étoiles, les secteurs connexes comme les hôpitaux, les aéroports ou les télécommunications qui auront été « upgradés » pour la circonstance, tout cela est désormais acquis. Ils sont à nous, nous les gardons. Et même nos milliers de visiteurs d’Afrique et du monde repartis, les motifs de continuer à nous en enorgueillir eux, demeurent.
Le terreau d’une fierté nationale solidifiée, peut donc par conséquent être capitalisé pour relever les autres nombreux défis qui nous attendent, pour peu que les politiciens du dimanche et les aboyeurs de l’espace numérique en comprennent le fonde-ment et y contribuent par des propositions et initiatives constructives en lieu et place de l’invective et la critique de principe – que dis-je- de posture. Ce Cameroun de la CAN à la tête bien « fête » nous a en tout cas fait bien plaisir, et votre magazine n’a pas manqué d’en capter quelques instanta-nées et histoires, qui feront l’essentiel du menu de cette édition.